mercredi 4 juin 2014

Le chat qui court après sa queue

Je n'écris plus ici. Ça ne me tente plus. Plus comme avant. Pas que je n'en aie plus besoin, parce qu'en dedans de moi, j'ai toujours autant de choses à dire. J'ai plutôt l'impression que je ne sais plus comment les dire. L'autre partie du problème est aussi qu'il n'y a pas grand-chose qui me tente, ces temps-ci. 

La vie de couple va bien. J'ai un amoureux merveilleux, à qui je peux tout dire et qui est là pour m'épauler en tout temps. C'est certain qu'on a nos accrochages comme tout le monde; la vie à deux demande des ajustements. Je ne pourrais pas dire qu'on se chicane, on s'obstine à  la tonne, ça oui. Mais pour la chicane, aucun de nous n'aime les conflits, ni les éclats de voix, ni le lançage d'assiettes. De toute façon, on a des assiettes qui ne se cassent pas, alors ça ne servirait pas à grand-chose. Je n'ai jamais eu un tempérament très bouillant et ce n'est pas aujourd'hui que ça va changer. Alors, quand on se confronte, ça fait dans le calme, moi avec mon air bête et lui son air encore plus sérieux qu'à l'habitude (parce que c'est Monsieur sérieux incarné celui-là) et on finit par en faire le tour. J'ai mes manies, il a les siennes, c'est normal qu'il y ait parfois des flammèches. Mais au final, je nous vois comme un couple harmonieux.

Donc, le problème n'est pas là. C'est tout le reste de ma vie qui me donne l'impression de tourner en rond. Je n'ai toujours pas d'emploi. J'ai abandonné le travail social comme je l'ai déjà dit - peut-être pas pour de bon, mais pour l'instant, oui - et je me cherche. Je cherche un emploi à temps partiel qui m'offre de la stabilité, de la flexibilité et qui correspond au peu d'expérience de travail que je possède. Secrétariat, travail de bureau, commis, rédaction... ce genre de choses. Je suis en train de penser de devenir caissière dans un Jean Coutu juste pour faire quelque chose.

Mais mes efforts de recherche sont vains, dernièrement. Je dois jongler avec les rendez-vous médicaux à tout bout de champ, les différents suivis en différentes cliniques. Insérer des entrevues d'embauche au travers de tout ça représente un méchant casse-tête. Ce ne sont pas les poumons qui font des siennes, heureusement, mais pleins d'autres problèmes autour. La prise d'anti-rejets provoque des effets secondaires indésirables qui sont difficiles à contrôler. J'ai dû me faire opérer la semaine passée et je suis donc en convalescence pour deux semaines. Ce n'était rien de grave - pour l'instant, car j'attends des résultats d'analyse - mais je suis très inconfortable en ce moment et mon niveau d'énergie est assez bas. Je n'ai pas beaucoup d'appétit non plus. Je fais la cuisine pour essayer de réveiller mon estomac.

Je surfe sur le net à la recherche d'activités à faire, de bénévolat, de chorales au sein desquelles chanter... et rien ne m'intéresse. Je me sens vide. Depuis un bout. Comme dépassée par les événements. Par ce que ma vie est devenue depuis la greffe. Je sais que je suis choyée d'être en vie et bien entourée et que je chiale le ventre plein. Mais on dirait qu'il me manque quelque chose. J'ai des problèmes d'ajustement, je pense. Quand j'ai commencé mon bacc en travail social en 2004, il y a une partie de moi qui se disait que je n'en verrais pas la fin, parce qu'il ne me restait pas tant d'années que ça à vivre. Ensuite, j'ai été greffée et j'ai pu terminer mon bacc. J'ai mon bout de papier, mais je ne sais pas quoi faire avec. Je le vois bien maintenant que ça me déstabilise. Je n'ai pas les forces physiques et mentales nécessaires pour exploiter cet aspect-là de ma vie. 

Je m'occupe de mon nouveau chez-moi, je cuisine, je prends soin des miens, je veille à ma santé, je fais du bénévolat une fois par semaine. Et quand j'ai terminé, je m'écrase devant la télé ou l'ordi. Parfois, je vais marcher jusqu'au bord du canal Lachine. Ça m'apaise un peu. Mais je reste toujours avec cette drôle d'impression au travers de la gorge que mes jambes ne me mèneront jamais assez loin. Je voudrais en faire plus, mais je n'en ressens pas l'énergie. Et comme je n'ai pas d'énergie, eh bien je ne fais rien. C'est un méchant cercle vicieux. Comme un chat qui court après sa queue. 

Je ne me sens pas utile. Mon amoureux dit que je vois ça pire que ce qu'est la réalité. Que je me mets trop de pression. Peut-être bien. Mais c'est que je pensais que l'après-greffe serait autrement. Comment exactement, je ne sais pas. Mais différent. Moins centré sur la maladie, les bobos, la déprime. Plus dynamique, plus satisfaisant, plus enrichissant. Oh, la plupart du temps, ce n'est pas si mal que ça. Mais des jours comme aujourd'hui, j'ai de la misère à distinguer le soleil au travers des gros nuages gris.

4 commentaires:

  1. Je ne suis pas une greffée... mais chercher le sens de la vie, le sens de SA vie au moins, je connais tellement... On pourrait en jaser longtemps...............

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  2. Je t'envoie un gros câlin virtuel, ma belle Viv. Tu avais de si grandes attentes de ta vie après la greffe, que la "platitude" de la réalité ne peut que te décevoir... Je te souhaite de tout cœur de retrouver ton énergie, ta santé et ton sourire. Gros bisous.

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  3. Impulsive: Faut croire que ça reste le problème de bien des gens, chercher un sens à la vie. Si quelqu'un a déjà trouvé la solution miracle, j'aimerais bien le rencontrer!

    Julie: J'imagine en effet que le fait d'avoir des attentes très élevées avant ma greffe n'aide pas ma cause. Ça a toujours été mon problème dans la plupart des sphères de ma vie, d'ailleurs. Merci du câlin.

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  4. ouais des fois je ressens la même chose que toi et l'impulsive. des hauts et des bas quoi! il ne faut pas se décourager :)

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