samedi 30 octobre 2010

Pardonnez-moi mon père car j'ai péché

Je réalise de plus en plus que j'ai un certain orgueil. Chose que je ne pensais pas posséder.

Je n'ai pas de problème à m'excuser quand je fais quelque chose de mal ou d'admettre que je me suis trompée. J'ai beaucoup d'auto-dérision quand vient le temps de rire des mes niaiseries (et j'en fais à la tonne!).

Mais. Quand j'ai le sentiment d'avoir échoué, que je me sens looser, là, l'immense orgueil fait surface. J'évite les questions-pièges, je change de sujet, je m'emmure dans le silence plutôt que de montrer aux autres mes échecs. Même si je sais bien que parfois, ce n'est pas tant que j'ai manqué mon coup, mais plutôt un bête concours de circonstances. J'aime mieux garder ça en dedans et ruminer mes tourments.

Je me sens comme si j'avais échoué. Même si ce n'est pas vrai. Même si au contraire, c'est probablement pour le mieux. Et qu'au fin fond de moi-même, ça me soulage. Mais même ici, j'ai comme cette boule dans le ventre qui m'empêche d'en parler. Pas tout de suite. Je ne suis pas prête. J'ai encore un orgueil à soigner.

mercredi 27 octobre 2010

Si loin, mais si proche

Six ans déjà... Et je ne t'ai pas oublié.

Tu es toujours là, présente dans mes souvenirs, des plus légers aux plus émotifs.
Tu es toujours là, dans ce cadre avec une photo de nous deux que j'ai posé sur ma table de nuit depuis ton départ.
Tu es toujours là, dans ce petit carnet mauve qu'on avait fait remplir par les infirmiers et infirmières qu'on aimait tant avant de quitter le monde des enfants vers celui des adultes.
Tu es toujours là, quand je fais le bilan de ma nouvelle vie dont j'aurais tant aimé que tu fasses partie.

Je te jure, tu n'en serais pas revenue de voir toute cette nouvelle énergie qui nous remplit un peu plus chaque jour. De goûter à cette liberté à laquelle on avait tant rêvé. À ces petits moments de bonheur qu'on osait s'imaginer, étendues côte à côte dans nos lits inconfortables de notre deuxième maison.

Bon, peut-être que je te peins la réalité avec un peu plus de fioritures qu'il n'en faudrait. Mais je te jure, tu aurais trouvé ça trippant quand même.

Je t'aime, Aurélie.

jeudi 21 octobre 2010

Des centaines de conversations

C'est à peu près le nombre de conversations que j'ai dû avoir dans ma tête, avec mes parents. Ma mère surtout. Sur mon besoin d'espace, de liberté, sur comment j'aurais besoin de gérer ma vie toute seule. Sur comment je n'en peux plus qu'ils mettent toujours leur nez dans mes affaires. 25 ans que je tente de conserver mon jardin secret, mais que j'y arrive très mal. Je peux être très poker face quand je m'applique, mais ils ont ce sixième sens pour détecter quand quelque chose ne va pas. Ça paraît dans mon langage corporel aussi. Et même si j'affirme ne pas vouloir en parler, ils me travaillent jusqu'à ce que je craque. Je garderais un tas de choses pour moi, mais j'ai souvent l'impression que ce n'est pas permis.

Je reste dans leur maison, c'est bien certain qu'il y a des comptes à rendre, des règles à respecter, puisque ce n'est pas mon vrai chez-moi. Enfin, c'est chez moi, et je sais que j'y serai toujours la bienvenue, mais ce n'est pas mon chez-moi à moi. Ma mère est à la retraite depuis peu, le sentiment de surveillance est encore pire maintenant. Quand je vais quelque part, je dois la mettre au courant. Sinon, elle mène son enquête. Elle n'a que ça à faire poser des questions et s'enquérir de mes allées et venues.

On a toujours eu cette relation un peu conflictuelle, ma mère et moi. Il y a de longues périodes d'accalmie où j'arrive à croire qu'on chemine avec l'âge. Mais quand l'orage revient, c'est moins drôle. J'ai de moins en moins l'impression qu'on se comprend. Et de moins en moins l'envie de me confier. Parce que je n'ai plus de patience pour gérer ses réactions extrêmes. Je tiens d'elle pour ça, le manque de patience.

Ne vous méprenez pas; j'adore mes parents. Sans eux, jamais je ne serais rendue où je suis maintenant. Mais plus je progresse dans le monde adulte et dans ce qui va être mon futur milieu de travail, plus je me rends compte que j'ai été trop couvée. Je ne sais pas faire face à la vraie vie. Je ne suis pas équipée, ou bien mal équipée, pour gérer des problèmes de grandes personnes. Affronter la maladie, la fatigue extrême, la tonne de médicaments à prendre par jour, ça, je peux. Parce que c'était quelque chose que mes parents ne pouvaient pas complètement gérer eux-mêmes, ces aspects de la maladie qu'ils ne pouvaient pas contrôler. Ils m'ont contrôlé à la place. Et là, je n'en peux plus.

Je crois que j'ai besoin de partir de chez mes parents. Il est temps parce que là, j'étouffe.

mardi 19 octobre 2010

Y en aura pas de facile

Je n'aime pas les piqûres et la douleur. Des bronchoscopies, je laisserais ça volontiers à d'autres.

Mais malgré tout, il y a un certain réconfort, une certaine familiarité à rechausser les souliers d'une patiente l'espace d'une demi-journée. Être prise en charge, être soignée et écoutée, c'est tellement plus simple parfois que de se retrouver dans le rôle inverse. Être à l'écoute, rencontrer des tas de gens différents dans la même journée, courir partout. Je commence à me demander si j'ai vraiment la force pour faire ça. J'ai l'impression de me fatiguer à rien, de me plaindre pour rien. D'avoir envie de tout et de rien à la fois.

J'aime trop la facilité, je crois...

jeudi 14 octobre 2010

Un bol de réconfort

Mon estomac était dans un tel état en fin de semaine passée que j'ai dû envoyer mon homme acheter du Gravol dans une pharmacie ouverte 24 heures à 2h00 du matin. Je me sentais mal de l'obliger à faire de la route comme ça pour quelques comprimés, mais je n'en pouvais plus de ce mal de cœur qui n'en finissait plus. J'ai dû le remercier des dizaines de fois de sa présence et de sa patience, en plus de m'excuser d'avoir gâché sa soirée. Je sais bien qu'on ne contrôle pas ce genre de choses, le corps faisant bien ce qu'il veut quand il le veut. Mais je suis comme ça moi, je me sens coupable facilement.

De le voir prendre soin de moi comme ça, ça m'a rappelé vaguement un texte lu il y a quelques années dans un livre dont j'ai presque envie de taire le nom tellement je ne m'assume pas de l'avoir acheté. Style un peu psycho-pop et quétaine, je l'avoue, ça s'appelle Bouillon de poulet pour l'âme du couple, si jamais ça vous sonne une cloche. Ils ont décliné le concept sur un tas d'autres thèmes, dans un ramassis de textes censés nous remonter le moral et nous faire sentir mieux lorsque le cœur n'est pas à la fête. Comme un bon bouillon de poulet qui vous réchauffe l'intérieur pendant une grosse grippe. Un réconfort oui, mais un réconfort coupable.

Le texte en question parlait de cette femme qui était à l'hôpital et qui venait de subir une grosse opération pour un cancer du sein. Elle se sentait moche, déprimée, et le choc de se voir dans le miroir l'avait mise dans tout un état. Son mari avait alors décidé de l'aider à se sentir mieux en lui lavant les cheveux, la coiffant et la maquillant. Ces petits gestes qui ont l'air si anodins, mais qui aident un peu à avaler la pilule. Même si ça ne règle rien en réalité. Ça apaise seulement de savoir que l'autre est là et qu'il est à l'écoute.

J'ai acheté ce livre alors que j'étais célibataire depuis plusieurs années et convaincue que je n'allais jamais réussir à revivre une histoire d'amour à cause de ma maladie qui était sur une pente descendante. J'avais besoin de réconfort. Peu importe ce que c'était. De me consoler en me disant que quelque part, il existait bien un homme compréhensif à qui la maladie ne faisait pas peur, qui serait prêt à prendre soin de moi malgré l'adversité... et l'éventualité d'un futur écourté.

Ma mère et mon père prenaient soin de moi à l'époque quand mon estomac faisait des siennes. Jamais un gars ne l'avait fait comme lui l'a fait. Et on parle ici d'un petit problème de digestion bien mineur comparé à tout ce que j'ai déjà vécu. Ça m'a touché quand même. Il était là, à me tenir la main durant les nausées et à me frotter le dos pour m'aider à m'endormir. J'ai souri dans le noir. Je n'ai plus besoin de bouillon de poulet pour l'âme maintenant.

jeudi 7 octobre 2010

A roller coaster built to crash?

C'est dur sur les émotions être en stage. Au début, ça l'était surtout pour le corps qui avait complètement oublié ce que c'était d'avoir un horaire de travail. Ça l'est encore un tantinet, surtout après la troisième et dernière journée de ma semaine de stagiaire, mais je devrais survivre (je me le souhaite, en tout cas).

Mais le fait d'être en stage en travail social et d'être supervisée par deux travailleuses sociales d'expérience qui ont vu neigé en masse et qui passent le plus clair de leur temps à analyser les autres, ça a comme impact (voire conséquence) qu'on se fait gratter la mousse de nombril en maudit. En séances de supervision obligatoire à chaque semaine, je me fais déterrer des bibites, des travers et des peurs que je préférerais garder enfouis. J'aime réfléchir, me questionner, m'analyser, mais il y a toujours bien des limites!

Je comprends l'importance de donner le meilleur de soi dans ce qu'on fait et d'avoir un intérêt manifeste pour son milieu d'intervention. Je pige tout ça, je vous l'assure. C'est légitime, jamais je n'oserais m'obstiner là-dessus. Et je fais de mon mieux avec ce que mon corps et mon esprit fatigués sont capable de fournir. Ça aussi, je vous l'assure. Mais je l'ai déjà dit: j'arrive mal à exprimer, voire à trouver de la passion dans ce que je fais de ma vie. En fait, je sais que des passions, j'en ai; le problème est que je n'en ai jamais eues pour les études ou le travail. Peut-être parce que je n'ai pas encore trouvé la place qu'il me faut dans la vie, MA place. Et je veux ardemment la trouver, pour pouvoir un jour affirmer avec conviction que j'aime ce que je fais dans la vie.

J'ai juste peur de devoir chercher longtemps. Et je n'ai plus envie de perdre du temps à chercher et à zigzaguer dans tous les sens.

Je sais une chose pour l'instant: j'aime bien les personnes âgées, je les trouve fascinants et tellement authentiques avec tout ce bagage de connaissances et d'existence qu'ils traînent avec eux. Mais. Ça ne deviendra jamais une passion. Pas en milieu hospitalier en tout cas. C'est un rythme que j'arrive mal à soutenir.

J'ai découvert aujourd'hui l'unité des soins palliatifs. Eh oui, moi qui ai eu si peur de la mort (beaucoup moins maintenant), j'ai voulu aller confronter la grande faucheuse en pleine face. Ma surperviseure trouvait que j'y allais peut-être un peu fort dans la confrontation, mais j'ai tenu mon bout. Et j'ai bien fait, parce que ça a probablement été une de mes meilleures journées en stage jusqu'à présent. J'écoutais la t.s. qui me supervisait pour l'occasion m'expliquer son rôle dans ce département et tout m'expliquer dans les moindres détails, et j'ai senti comme une petite étincelle jaillir en moi. Et que dire de cette atmosphère si sereine qui m'entourait, malgré le fait que la mort vous attend derrière chaque porte de chambre. J'étais avide de tout découvrir, mais aussi étrangement calme, comme si des pièces d'un puzzle venaient naturellement de s’imbriquer les unes dans les autres. Ça m'a fait un bien fou. Je me sentais revigorée, même plus légère quand j'ai quitté à la fin de la journée. Ça changeait du stress et de la lourdeur des derniers jours.

Peut-être bien qu'il y a de l'espoir finalement.

mercredi 6 octobre 2010

Cherchez l'erreur

60 000 personnes se sont présentées pour la Marche Bleue à Québec dans l'espoir de voir revenir un jour la sacro-sainte équipe des Nordiques. 60 000 personnes pour une foutue équipe de hockey.

Le lendemain, un peu moins de 30 000 personnes sont allées marcher pour la cause du cancer du sein. Ça aurait pu, et aurait dû, être au moins 90 000. Mais les 60 000 manquantes étaient toutes à Québec la veille, ça l'air.

Y a-tu juste moi qui trouve ça illogique? On est prêt à donner de son temps pour un amphithéâtre qui va coûter des millions de beaux dollars au gouvernement, pendant que des milliers de femmes meurent du cancer parce qu'on préfère que les beaux dollars du gouvernement soient investis dans une fucking patinoire plutôt que dans la recherche médicale. Ou encore dans la construction d'un nouveau CHSLD pour nos personnes âgées qui se font trimballer d'un centre à l'autre parce qu'on ne peut pas leur offrir un endroit stable dans des délais raisonnables. La raison: trop d'attente parce que pas assez de ressources.

C'est bien certain, nos ressources en ce moment, elles ont toutes été cachées dans le costume de la mascotte Badaboum...

lundi 4 octobre 2010

Trop de deuils

Je regardais ces femmes, à Tout le monde en parle, qui ont goûté à la maternité pour à peine quelques heures, quelques jours, et je les trouvais si fortes d'être encore debout après une telle épreuve. Couver un petit trésor pendant neuf mois, le chérir avant même qu'il ne soit arrivé dans le vrai monde et faire un tas de projets futurs, c'est le cours normal des choses pour une femme enceinte. Voir tout cet avenir et cet amour mourir si tôt, ça, ce n'est pas normal.

Mon désir de devenir mère qui avait été enfoui bien loin en moi a été renouvelé à la naissance d'un nouvel amour. Au contact des enfants des autres dans mon entourage, ça m'a ouvert les yeux: ce n'est pas parce qu'on accepte une situation que l'envie disparaît pour toujours. Une pensée refoulée n'est en réalité que refoulée; elle peut donc remonter à la surface à tout moment. Avec l'envie remonte aussi un tas de craintes.

J'ai une possibilité devant moi, à présent. Je pourrais vivre l'expérience de donner la vie, être témoin de ce phénomène incroyable, de voir mon ventre pousser comme un ballon. De sentir la vie en moi d'une façon encore plus tangible et réelle que ce que je ressens présentement. Je pourrais...

Mais si je le perdais, cet enfant? Si ce corps que j'apprivoise encore ne pouvait supporter cet assaut de vie? Si l'improbable arrivait? Si les effets secondaires des anti-rejets inconnus de la médecine affectaient le fœtus d'une façon telle qu'il mettrait sa survie en danger? Si toutes ces incertitudes qui font peur aux médecins se concrétisaient? Si si si...

Trop de questions que je ne devrais pas me poser pour l'instant, mais que je me pose quand même. On m'a souvent répété à quel point on me trouvait forte et courageuse de m'être battue contre la maladie et d'avoir passé au travers d'une dure opération comme la greffe. Et des fois, ça me frustrait parce que ce n'est pas nécessairement de la force pour moi. C'est plutôt que je n'ai pas eu le choix. Je voulais vivre. Alors, j'ai tout donné. Parce que j'avais certaines armes à ma disposition pour me battre. Et peut-être que c'en est de la force et du courage au fond, je ne sais pas. Mais devoir faire le deuil d'un amour avorté, ça, je sais que je ne pourrais pas.

Je commence à en avoir marre de tous ces deuils dans ma vie.